La genèse d’Ambre

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Un des premiers essais pour le menu principal

Vu que le jeu est sorti depuis maintenant 2 mois, je me dis que c’est le bon moment de parler de sa genèse avant de passer à la suite de Milk, sur laquelle nous planchons actuellement et qui s’annonce pleine de défis. Evidemment, les spoilers sont de mise, ne lisez pas avant d’avoir terminé le visual novel !

Comédie romantique versus zombies

L’idée première m’est venue à travers un échange banal entre moi et mon colocataire qui me racontait le contenu de son livre de zombies, dont j’ai oublié le nom depuis : dans l’un des chapitres, le narrateur interroge une petite fille ayant survécu à une invasion. Elle a perdu ses parents dans la foulée et livre un témoignage vibrant lorsque l’auteur dévoile que celle qui parle est en réalité une très vieille femme qui est restée coincée dans sa tête au moment du drame et se croit toujours enfant. J’avais trouvé le retournement de situation particulièrement intéressant et je m’étais dit que je l’utiliserais volontiers dans une de mes histoires si j’en avais l’occasion.

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Sketchs de l’héroïne

Pendant l’été qui venait de s’achever, j’avais eu l’occasion de me rendre en train jusqu’à Paris pour Epitanime et la même affiche de film ornait toutes les gares dans lesquelles j’ai pu passer. Une publicité pour une nouveauté romantique, l’histoire d’un couple heureux qui basculait lorsqu’à l’issue d’un accident la fille perdait la mémoire et revenait plusieurs années en arrière, obligeant l’homme à la séduire une nouvelle fois pour retrouver le bonheur perdu. Si j’en crois la critique et Wikipédia, ce n’était qu’un divertissement convenu et pas très original, et ça finissait forcément en happy end. Peu importe. Toujours est-il que je me suis demandée ce qu’il adviendrait de mon compagnon si je me réveillais un matin sans me souvenir de lui et quel comportement j’adopterais selon la coupure dans ma mémoire. Vu que j’ai énormément changé avec le temps, le résultat était toujours surprenant.

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Brouillons du CG de la balançoire

C’est en combinant ces deux éléments que le scénario d’Ambre a commencé à prendre forme, même s’il était encore à l’état de premier jet boiteux. J’avais déjà une idée du « twist » final et de la trame mais encore fallait-il la remplir et trouver une raison à la régression de l’héroïne. L’histoire aurait donc pu rester mourir dans ma tête s’il n’y avait pas eu une autre source d’inspiration inattendue.

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Brouillons du chibi de l’interface

Cinderella ate my daughter

Je regarde occasionnellement des vidéos sur That Guy With The Glasses, parfois un peu au hasard, et c’est comme ça que je suis tombée sur une critique de la chanson Moment 4 Life de Nicki Minaj. Je ne connais rien du tout aux starlettes à la mode, ça ne m’intéresse pas, et tout ce que j’avais pu entendre à propos d’elle c’était les remarques acerbes d’une amie qui me disait que c’était de la merde. Mais cette chanson m’a marqué justement parce qu’elle constitue une démonstration assez vibrante du syndrome de Cendrillon à l’époque moderne, un sujet qui lui me passionne beaucoup.

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Essai de positionnement des sprites sur le décor

Tous les tropes sont là, aussi bien dans les paroles que dans l’imagerie déployée. Ainsi la jeune femme fait état de son désir d’ascension sociale comme quelque chose qui lui est dû mais dont elle a été privée de manière injustifiée, du fait qu’elle ne soit pas juste chanceuse mais une sorte d’élue, et que son nouveau statut de star la rapproche d’une reine/princesse, le tout pour mieux répéter lors du refrain que maintenant qu’elle a atteint son rêve, elle veut qu’il dure pour toujours. Le clip ne fait qu’entériner cette obsession en présentant une marraine la fée chargée de veiller sur la starlette/princesse qui donne un grand bal, occasion d’étaler son luxe et son oisiveté (grande maison digne d’un palais, foule de convives, jardin immense, mobilier somptueux, passage de la montagne de chocolats très révélateur de la vision de la richesse actuelle et qu’on peut mettre en parallèle avec la mode lancée par le film Marie Antoinette de Sophia Coppola), mais aussi de rencontrer un « prince charmant », qui n’est autre qu’une star en pleine ascension comme elle. Le clip pousse même le vice jusqu’au bout en représentant le « mariage » des deux chanteurs sur fond de feu d’artifice, comme pour insister sur le happy end éternel du conte de fée.

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Brouillon du CG de l’album photo

Sauf qu’évidemment, on remarque des tas de petits détails qui viennent ruiner cette perfection : le « couple » de rappeurs semble totalement isolé dans leur célébration, comme si devenir une star supposait forcément de faire le vide autour de soi, leur mariage sonne comme une farce (ils ne font même pas semblant de s’embrasser ou de s’aimer, c’est purement symbolique, l’union paraît uniquement économique/bizness), et surtout on ne voit que la toute fin du conte de fée. Parce que pour arriver au niveau de starlette, on suppose que Nicki Minaj a bien dû trimer un petit peu et que ça devait être nettement moins esthétique à regarder. D’ailleurs, en parlant de « joli », son physique est totalement défiguré par la chirurgie, c’en est impressionnant ! Il suffit de traîner sur le net afin de retrouver une photo d’elle avant pour s’en convaincre : de mignonne, elle est devenue une sorte de monstre fabuleux censé correspondre aux critères de beauté actuels mais avec une plastique complètement tordue (ses yeux, ses lèvres, ses seins, elle ne ressemble même plus à une femme normale).

De Cendrillon à Ambre

Quand j’ai écouté cette chanson, j’ai été fasciné, non pas par la musique ou la chanteuse, mais par ce que le personnage représentait. Par le fait que quelqu’un puisse sacrifier toute son existence pour la promesse d’une vie rêvée à la Cendrillon aussi creuse et vide soit-elle. Je n’ai pas pu m’empêcher de me dire que le souhait formulé dans la chanson était à la fois incroyablement superficiel et incroyablement humain. Aussi ai-je eu très envie d’intégrer le syndrome de Cendrillon à l’histoire incomplète que j’avais jusque là et d’en faire la raison de la folie de l’héroïne.

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Brouillon de l’hôpital et version cauchemar alternative

Le scénario que j’avais en tête étant tout de même très court, je me suis dis qu’il valait mieux le garder pour participer au Nanoreno, un concours qui me faisait de l’œil depuis un moment, sauf que sur le moment l’épisode 1 de Milk n’était pas encore sorti, il nous a donc fallu rusher une première fois pour le finir et une seconde fois pour mener à bout le projet malgré une pluie de complications : Roganis, notre compositeur habituel étant parti au Japon, il lui était impossible de nous joindre, ce qui me forçait à recruter quelqu’un en urgence (on a eu de la chance que Kimino réponde et s’occupe très rapidement de la musique) ; de plus mon ordinateur personnel est tombé en panne à cette période, compliquant énormément la gestion des ressources. Sur la fin, nos deux graphistes étaient toutes les deux en difficultés : Melow était tombée malade et Morsy ne savait pas si elle allait finir les dernières CGs à cause de son stage. Heureusement, le jeu n’avait pas besoin d’énormément de ressources, mais la précipitation nous a empêché de polir certaines choses (le dernier décor, le code des feuilles mortes).

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Ancienne version du décor de la rue et brouillon de la nouvelle

Au bout du compte, la team a réussi à finaliser Ambre juste à temps et les retours sur l’œuvre ont été plutôt positifs. Je n’avais pas pensé reprendre le thème de Cendrillon une nouvelle fois mais je suis assez satisfaite du résultat même si j’ai eu beaucoup de mal à m’y mettre. Le fait de jouer avec le lecteur m’a amusé et j’espère bien reproduire ce genre de tromperie à l’avenir…encore désolée pour ceux qui croyaient avoir à faire à une innocente petite fille X’). Maintenant que cela est fait, restez à l’affût, des informations sur Milk ne vont pas tarder à tomber !

EDIT : la bande-son du jeu est disponible gratuitement ici